Le scénario de vie : Silence ! Ça tourne !

Et voici le concept phare de l'Analyse Transactionnelle. C'est le concept le plus dense et complexe de cette approche puisqu'il englobe la plupart des autres concept, formant un maillage qui structure et détermine nos actions et nous mène vers une direction de vie.

Mais alors, qu'est-ce qu'un scénario de vie ? Pourquoi ce terme cinématographique ?

C'est ce que je vais tenter de vous expliquer en simplifiant au maximum le sujet.

Pour Eric Berne, père de l'Analyse Transactionnelle, le scénario de vie est :

" Un programme continu, formé dans la petite enfance sous pression parentale, qui dirige le comportement de l'individu dans les aspects les plus importants de sa vie".

Richard Erskine, docteur en psychologie et transactionnaliste, ajoute que le scénario de vie est la réponse à la question :

"Que fait quelqu'un comme moi, dans un monde comme celui-ci, avec des gens comme vous ?"

En résumé, le scénario de vie est une direction que l'on a tracée dès la petite enfance, de part les interactions avec nos référents parentaux et de ce que l'on en a déduit, pour se frayer un chemin dans l'existence.

N'avez-vous pas déjà remarqué que certains évènements, issues, contextes se répètent dans notre vie ? Ne vous êtes pas déjà entendu dire : Je m'en doutais ! Comme d'habitude ! Il n'y a pas de hasard !...C'est vrai, bien que le hasard existe, il y a de forte chance que votre scénario de vie ne soit pas étranger à certaines répétitions dans votre existence.

Nous adoptons souvent les mêmes méthodes, réactions, croyances pour interagir avec les évènements et avec les autres, ce qui explique les situations familières, les sentiments perpétuels de déjà vécu, l'impression de toujours se mettre dans le même type de relation.

Parce qu'inconsciemment, nous suivons notre scénario de vie.

Mais alors, comment construisons-nous notre scénario de vie et de quoi est-il composé ?

Lorsque nous venons au monde, comme la plupart des espèces animales, nous progressons et apprenons en suivant un modèle, souvent celui de nos parents. Nos parents jouent leur rôle d'éducateur en nous montrant le modèle à suivre (délibérément ou inconsciemment).

J'évoque le mode inconscient car nos parents peuvent nous montrer involontairement comment faire des choses, de part leurs attitudes dans leurs interactions entre adultes. Il auront beau nous dire de ne pas faire ci ou ça, le petit enfant que nous sommes aura quand même enregistré les faits et gestes de ses référents parentaux. Ils resteront gravés.

C'est comme cela que vont se mêler dans notre esprit, les messages directs (ce qu'ils nous auront dit) et les messages que nous auront déduit en observant leurs attitudes.

Ces deux types de messages vont être envoyés par les États du Moi des parents vers les États du Moi de leur enfant.

matrice de scénario de vie

Nous voyons, sur cette matrice, que plusieurs catégories de messages sont (consciemment ou non, verbalement ou non) adressés au États du Moi de l'enfant par les États du Moi de ses parents, durant les premières années de son existence. Ces messages vont avoir un rôle capital dans l'élaboration du scénario de vie de l'enfant car il va les assimiler, les interpréter, puis les faire siens. Les déductions que l'enfant en fera, guideront ses faits, gestes, attitudes et décisions durant toute sa vie, à moins qu'un évènement (une thérapie par exemple) lui permette de re-décider son scénario de vie.

Mais, n'allons pas trop vite ! Voyons d'abord quels sont ces messages.

1. Les Injonctions et les permissions

Injonctions et permissions sont transmises de l'État du Moi Enfant (E) du père et/ou de la mère à l'État du Moi Enfant (E) de...l'enfant (vous me suivez toujours ?).

Les injonctions (ou messages inhibiteurs) sont des messages négatifs, d'interdit, transmis (inconsciemment en général) dès le plus jeune âge. Comme ces messages sont transmis très tôt, ils sont ancrés profondément en nous et ont beaucoup de pouvoir sur nos réactions.

Les injonctions sont nombreuses mais il en existe 12 principales (les plus courantes) qui ont été recensées:

- N'existe pas

- Ne sois pas toi-même

- Ne sois pas un enfant

- Ne grandis pas

- Ne réussis pas

- Ne fais pas

- Ne sois pas important

- N'appartient pas (n'aie pas d'attaches)

- Ne sois pas proche

- Ne sois pas en bonne santé

- Ne pense pas

- Ne ressens pas

Liste non exhaustive à laquelle on peut ajouter, par exemple :

- Ne sache pas

- N'aie pas de besoins

- Ne dérange pas

- N'aie pas de plaisir

- Ne fais pas confiance

Et là, je vous entend dire : "Comment un parent peut délivrer ce genre de message négatif à son enfant ?! "

Parce que ce sont des messages non verbaux et inconscients. Évidemment, aucun parent aimant ne donnera ce type de message directement et consciemment à son enfant. Il va, néanmoins, en transmettre certains par le biais d'attitudes, de comportement, que l'enfant aura observés dans ses interactions directes ou indirectes avec eux.

Par exemple, un enfant, qui reçoit une attention et des marques d'affection disproportionnées lorsqu'il est malade, et en reçoit peu lorsque tout va bien, pourra en déduire qu'il est préférable de ne pas être en bonne santé pour être aimé.

Cet exemple peut paraitre simpliste, mais rappelons-nous, que lorsque nous faisons ce raccourci, nous sommes aux premières années de notre vie !

Rappelons-nous également, que les déductions faites par l'enfant, servent à se maintenir en vie dans les meilleures conditions possibles.

Heureusement, chaque injonction ou message inhibiteur possède son miroir permissif.

Ainsi, l'enfant ne déduira pas que des messages négatifs. Il enregistrera, de la même façon des permissions.

Un article détaillant les injonctions et permissions, dans ce blog, pourra vous aider les explorer plus en détail.

2. Les contre-injonctions (Drivers)

Les contre-injonctions sont, comme leurs noms l'indiquent, faite pour contourner les messages inhibiteurs. Ces messages sont transmis par l'État du Moi Parent de père et/ou de la mère à l'État du Moi Parent de leur enfant (je sais, c'est compliqué de ne pas se perdre entre Enfant et enfant !)

Les contre-injonctions sont, plus communément, appelées Drivers, car c'est une conduite à tenir pour contourner les interdits des injonctions.

Ils sont au nombre de 5 :

- Sois parfait

- Fais plaisir

- Sois fort

- Fais des efforts

- Dépêche toi

Même si ils ne représentent pas d'interdit, ils sont contraignants car ce sont des règles de vie imposées, des prescriptions sur comment il convient de se comporter.

Nous en possédons tous plusieurs, à divers niveaux d'importance. Ces drivers orientent nos réactions, notre style de vie, notre façon d'être.

Ainsi, nous nous disons : " je suis Ok si je suis...(parfait, fort etc...)"

Par exemple, avec le drivers "Fais plaisir", nous en déduisons que si nous faisons plaisir à autrui en oubliant nos priorités, on nous aimera.

Un autre article leur est consacré afin de vous aider à les reconnaitre et de mieux comprendre leur importance dans notre quotidien.

3. Le programme

"Voici comment il faut faire..."

C'est le message transmis par l'État du Moi Adulte du père et/ou de la mère à l'État du moi Adulte de son enfant. Une attitude, un slogan, une démonstration pour naviguer dans les eaux troubles de l'existence. C'est le mode d'emploi que l'enfant va déduire, trouver, et suivre.

Quels sont les effets de ces messages ?

Les messages scénariques ont pour effets de créer et maintenir nos croyances pour entretenir notre plan de vie au jour le jour.

Reprenons la citations de Richard Erskine

"Que fait quelqu'un comme moi, dans un monde comme celui-ci, avec des gens comme vous ?

Moi, les autres, le monde...

Les messages introjectés depuis l'enfance ont façonnés notre vision de soi, des autres, du monde en général. Nous les voyons avec nos propres lunettes de croyances.

Nous n'y sommes pas continuellement mais lorsque nous sommes au prise avec nos croyances, nous naviguons dans un circuit qui s'auto alimente.

Lorsque nous sommes sous l'influence de nos croyances, nous agissons en fonction de celles-ci. En retour, les autres réagissent par rapport à notre comportement influencé par nos croyances.

Et c'est là qu'apparait la sensation de répétition évoquée au début de cet article, puisque la réaction des autres, leur façon de nous traiter renforce nos croyances et alimente ainsi le cercle vicieux et répétitif.

Si, par exemple, une de nos injonctions est de ne pas faire confiance, un de nos drivers est d'être fort, il y a fort à parier que la croyance sera "On ne peut compter sur personne". Dans ce cas, j'aborderai la vie, les autres, de façon à ce que mes interactions suscitent des réactions extérieures qui valideront cette croyance et, ainsi, un des messages de scénario de vie !

Et, quid des décisions autonomes ?

Dans ce schéma où semble tout tracé et inévitable, il reste une place pour notre aspiration de vie. Notre "Physis".

Notre scénario de vie n'est, heureusement, pas bouclé dès les premières années de notre vie.

Il peut évoluer, notamment, lors de rencontres ou d'évènement marquants et, il peut aussi prendre une autre direction lorsque nous re-décidons nos vies. Car, pour la plupart d'entre nous nous sommes animés par une pulsion de vie et recherchons le bonheur.

C'est ce qui peut amener certains en consultation. La répétition est agréable si elle est positive mais si elle entretien un état de malaise perpétuel, se pencher sur son scénario de vie en thérapie est souvent salutaire.

J'espère que cet article vous éclairera sur la notion de scénario de vie. J'ai tenté de le simplifier au maximum. Le circuit est un peu plus complexe mais vous avez eu un aperçu de sa structure.